Refondation de la politique d'intégration Gouvernement Ayrault 2013-2014

En 2007 Jacques Chirac lance l'observatoire de la laïcité. Mais alors même que pendant cette période, les polémiques se succèdent il n'est mis en place qu'en avril 2013. Le premier rapport conclu à une sur-estimation des problèmes liés à la laïcité dans la société française. Dans la foulée le premier ministre Jean-Marc Ayrault commande un rapport sur l'intégration à un conseiller d'État, Thierry Tuot, qui l'intitule "La grande nation, pour une société inclusive" (1er février 2013). Le même mois le Matignon annonce le projet de Refondation de la politique d’intégration, lancé début juillet avec la première réunion des experts qualifiés à qui ont été confiés les groupes de travail de la refondation basée sur le rapport Tuot.

Leur rapport est publié en novembre 2013  sous le titre "Refonder la politique d'intégration". Il recommande :

 

- Suppression du terme intégration

- Reconnaissance des identités multiples et des cultures plurielles

- Multiplication des instances de contrôle des droits des immigrés, dont une "cour des comptes de l'égalité"

- Evaluation de la politique publique tous les 5 ans

- Limitation du recours aux circulaires substitutives de la loi

- Révision des programmes scolaires d'histoire en y intégrant "l'histoire des mouvements de population dans leur globalité", "ceux liés à l'esclavage et à la traite négrière, aux colonisations, à l'immigration économique..."

- Augmentation du nombre d'étudiants étrangers dans les grandes écoles et les classes préparatoires intégrées

- Renforcement des moyens et des méthodes pédagogiques de l'école pour les enfants en difficulté scolaire dans les écoles où sont scolarisés les enfants des milieux populaires.

- Développement des langues vivantes des immigrés à l'école

- Suppression des règles scolaires discriminatoires concernant notamment le "voile"

- Création d'un délit de harcèlement racial

- Ouverture du droit à certaines prestations quasi automatique

- Assouplissement des conditions d'attribution du RSA

- Suppression des conditions de nationalité pour accéder à un emploi, tant dans les fonctions publiques que dans les secteurs public et privé

- Revu des textes "qui comportent des mesures discriminatoires ou dont les effets induits sont des processus discriminatoires"

- Création de garanties en matière de sécurité publique, de paix civile et d'atteinte à l'intégrité des personnes et des biens, incluant "l'obligation d'une motivation explicite dans la réquisition des contrôles"

- Renforcement significatif des montants des indemnités de réparations pour faits de discriminations dans le droit du travail

 

Les rédacteurs de ce texte avaient semble-t-il très envie que des choses changent. Comme souvent, lors de guerres d'influence à la mode de chez nous (doudiou!) nous demandons plus pour obtenir peu. Entre les demandes symboliques comme "changeons de nom, ça changera bien quelque chose", les machines à gaz (création de nouvelle commissions qui créeront de nouveaux instituts afin de créer un groupe de travail qui créera une nouvelle commission...) et les mesures légales attaquant directement le problème il y a de quoi discuter. Effectivement cela a été discuté. Cette question a mobilisé salive et encre, Le figaro, le JDD, Libération, le Monde, Slate, Huffpost, L'obs, relaieront les polémiques. Fort de notre grande capacité au consensus, la polémique médiatique construite avec efficacité, a conduit à "enterrer" le rapport avant même qu'ils aient été lus et discutés. Un discours nationaliste voire raciste, qui jouait d'une panique morale en annonçant la fin du "modèle républicain" et de "l'identité nationale" française, a ainsi écarté la possibilité de réfléchir et débattre des enjeux et des défis actuels.

CARAMBA! ENCORE RATE!!

Un moment d'histoire où on aurait pu tenter de soigner ce clivage, qui réjouis à la fois les Islamiques radicaux et les partis politiques. Les premiers exploitent les inégalités, les discriminations, la colère sourde accumulée chez les français qui épouse l’islam comme meilleure définition que beur ou rebeuh. Ainsi leur islam étendard devient une identité dissolvant les individus et facilitant la constitution d'un groupe "les musulmans", comme s'il existait une évidente uniformité de l'Islam. Les seconds jusqu'alors soumis aux lois antiracistes se laissent aller à une conception de la laïcité et de la république exclusive, teintée d'un racisme échappant aux radars de la justice, accroissant la stigmatisation du groupe "les musulmans" qui s'est auto-désigné par visibilité ostentatoire. La boucle est en place, agissant comme un coin dans le marbre national, le fracturant sur les lignes de faiblesse institutionnelle et sociale. Je pensais déjà à un vrai risque d'affrontement entre la minorité musulmane à laquelle j'étais inévitablement assimilé et la majorité des français qui se réunissaient pour des motifs différents contre une islamité plus fantasmée que réelle.